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    Plus loin, elle tomba sur la vitrine d’un magasin de vêtements qui lui renvoya son reflet. Il n’était certes pas aussi limpide et précis que celui d’un miroir, mais cela suffit à la jeune fille pour voir son visage. Ses cheveux le lui cachaient en partie ; cependant Rachel s’aperçut que la lueur irréelle de ses pupilles était bien visible malgré l’obscurité. Leur couleur inimitable lui avait permis de se rapprocher d’Hugo de manière… plutôt intime. Cela n’était pas étonnant : ses yeux à l’éclat bleu électrique avaient toujours suscité l’admiration et fasciné ses interlocuteurs.

     

    Cette soudaine confrontation avec elle-même lui rappelait dans quelles circonstances elle avait rencontré Hugo et ses compagnons de squat, un mois et demi plus tôt. Rachel ne s’était jamais vraiment entendue avec ses parents, car elle avait une mentalité d’artiste alors qu’eux étaient des cadres dont le but premier était de gagner de l’argent. Quand elle avait eu dix-sept ans, elle avait entrepris sur un coup de tête de se teindre une mèche de cheveux de la même couleur que ses yeux, ce qui lui avait valu une désapprobation sévère de la part de ses géniteurs. Plus tard, son refus d’entrer dans une école de commerce avait achevé de semer la discorde entre eux. Après de longs mois de reproches à peine dissimulés et de violentes disputes, Rachel avait décidé de fuguer, mais la dureté de la rue l’avait vite rattrapée. Au bout de deux semaines passées dans le froid, sans presque rien à manger, Rachel était sur le point d’abandonner son combat et de retourner chez ses parents, vaincue. Jusqu’au jour où elle avait rencontré Hugo.

     

    Rachel secoua la tête comme pour effacer la vision de son esprit. Certes, il ne s’agissait pas d’un mauvais souvenir, loin de là, mais il lui rappelait sa douloureuse situation. Sentant les larmes lui monter aux yeux, Rachel reprit sa route. Elle dépassa plusieurs couples ; ils avaient tous l’air heureux et serein. La jeune fille bifurqua dans une petite ruelle pour s’épargner cette vue mais il était trop tard : elle se remettait à pleurer. Elle poussa un juron en se frottant les yeux avec rage.

     

    Rachel s’éloignait de plus en plus du squat. Bientôt elle n’entendit plus rien des bruits environnants ; tout était redevenu plus calme. Elle savait qu’Hugo n’allait pas tarder à partir à sa recherche et elle ne voulait pas qu’il la voit ainsi, frigorifiée et à moitié en larmes. Il fallait qu’elle se calme, puis qu’elle rentre comme si tout allait bien. Ensuite elle se joindrait à ses compagnons en essayant de ne pas penser à ce qui la tourmentait. La jeune fille soupira et esquissa un sourire forcé. Elle fit comme si elle s’adressait à un Hugo invisible et articula : « Ce n’est rien, j’avais juste besoin de prendre l’air. » Mais la déclaration sonnait faux : elle avait encore des sanglots dans la voix. Rachel jura de nouveau et commença à rebrousser chemin, se disant que cela serait plus crédible encore si elle lui parlait face à face.

     

    Soudain, les lampadaires de la rue où elle se trouvait se mirent à clignoter de manière arythmique, tels des cœurs de lumière palpitant dans l’obscurité. Rachel sentit la peur lui contracter l’estomac et elle accéléra le pas. Ce n’était rien pourtant, sans doute un problème avec les ampoules… La lumière tamisée continua d’éclairer le trottoir pendant un instant, puis s’éteignit complètement, laissant la jeune fille dans le noir le plus total ; la nuit était tombée depuis de longues heures déjà et la lune n’illuminait le ciel que très faiblement. Rachel fut pris de panique et commença à courir pour rejoindre une avenue plus animée et surtout moins sombre. Cette phobie du noir lui venait de son enfance ; bien sûr cela allait mieux aujourd’hui, mais elle éprouvait toujours un malaise lorsqu’elle se retrouvait plongée dans l’obscurité.

     

    Brusquement, une énorme boule blanche, irradiant comme un soleil miniature, apparut à un mètre au-dessus du sol juste en face d’elle. On aurait dit un spectre insolite sorti tout droit des enfers. Rachel hurla de surprise et de terreur ; elle perdit l’équilibre et s’effondra sur l’asphalte enneigé. L’étrange sphère se rapprochait irrémédiablement d’elle, comme si elle cherchait à la rencontrer. La jeune fille, elle, tentait de reculer, ignorant la morsure du verglas sur ses paumes et les écorchures sur ses genoux ; elle était terrorisée et aurait voulu s’enfuir le plus loin possible. Le globe lumineux, semblant s’être aperçu de son effroi, s’arrêta quelques secondes, puis s’approcha de nouveau. Rachel se rendit compte qu’elle ne pouvait plus bouger ; elle ignorait pourquoi, elle se sentait paralysée par une force qui la dépassait, et de loin. Elle voulut appeler à l’aide, mais sa voix resta coincée dans sa gorge. Finalement, la boule blanche lui toucha le front en murmurant un borborygme aussi mélodieux qu’incompréhensible. Atteignant le paroxysme de la panique, Rachel s’évanouit.

     

    *

     

    *   *

     

    La première chose qu’elle vit lorsqu’elle se réveilla fut la fresque bleue au plafond, celle-là même qu’elle avait réalisée quand elle était arrivée au squat. Rachel en déduisit qu’elle était de retour au local souterrain où elle avait élu domicile. Mais comment avait-elle fait pour revenir ? Elle ne se souvenait de rien… Soudain un souvenir émergea de son esprit encore obscurci par le sommeil : une sphère blanche s’approchant d’elle dans une ruelle déserte… Ah, ça, ce n’était qu’un rêve, un cauchemar… Rien de bien important… A peine eut-elle pensé cela qu’une vive douleur lui enserra la tête. Elle voulut esquisser un mouvement mais elle était comme engourdie et elle ne put même pas bouger le petit doigt, ce qui l’énerva grandement.

      

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    La suite le samedi 20 octobre !

     


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  •  La mésange

     

    Je suis allongée sur le sol moelleux

     D’une vaste forêt de cristal ;

     Le vent tiède qui caresse mes cheveux

     Transporte des effluves de fleurs d’opale.

     

    Le regard perdu dans les hautes branches,

     Je laisse mes pensées vagabonder.

     On aperçoit à peine le ciel pervenche :

     Mon seul éther est cette scintillante canopée.

     

    Bercée par le silence,

     Je ne pense à rien.

     A quelques mètres de là dansent

     Des papillons aux ailes carmin.

     

    Je me sens si molle, si fatiguée…

     Sur un de mes bras nus et immobiles

     Une mésange charbonnière décide de se poser,

     Cessant pour un instant ses mouvements fébriles.

     

    Ses pupilles curieuses rencontrent les miennes

     Vides, éteintes comme des bougies mortes.

     Qu’à cela ne tienne !

     De mon âme l’étrange oiseau ouvre la porte.

     

    Dans mon esprit, j’entends ses petites pattes affairées.

     Elles font moins de bruit qu’un murmure

     Mais c’est aussi désagréable qu’un voyeur indiscret

     Qui regarde des jolies filles par le trou de la serrure.

     

    Troublée, j’essaie de la faire partir

     Mais c’est trop tard maintenant.

     Ses petits yeux couleur saphir

     Brillent d’un éclat malveillant.

     

    Mes forces peu à peu m’abandonnent.

     Le funeste oiseau me picore de l’intérieur

     Comme un marteau qui marmonne ;

     Du coin de l’œil il m’observe d’un air rieur.

     

    Dans un dernier sursaut

     Je me dis : « C’était pas malin

     De se faire berner par un oiseau…

     A moins que ce n’en soit pas un. »

     

    De l’extérieur on dirait une fille endormie

     En proie à un cauchemar sordide.

     Mais en réalité elle est déjà partie

     Ce n’est plus qu’une coquille vide.

     


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    Lumière sur... Kanon Wakeshima

     

    Kanon Wakeshima est une jeune artiste née en 1988 qui joue du violoncelle depuis ses trois ans (c’est dire si elle est expérimentée !). Elle écrit toutes les paroles de ses chansons mais c’est son producteur qui s’occupe de la musique. Tiens, parlons-en, de son producteur ! Il est très connu (si, si, je vous assure) puisqu’il s’agit de Mana, ancien guitariste de Malice Mizer (qui au passage a aussi vu l’apparition de Gackt, autre grande star nippone. Mais passons).

     

    Ses deux albums, Shinshoku Dolce et Shoujo Jikake no Libretto ~ Lolitawork Libretto, sont licenciés en France (label Wasabi). D’ailleurs, à l’occasion de la sortie en France de Shinshoku Dolce, Kanon Wakeshima a été invitée à la Japan Expo (honneur ultime ha, ha). Deux des chansons de Shinshoku Dolce ont été utilisées comme génériques de fin pour l’anime Vampire Knight. Comme elle est plutôt jolie, elle travaille aussi pour une agence de mannequinat, nommée Baby The Stars Shine Bright. Elle ne chôme pas, en tout cas.

     

    Notre violoncelliste est aussi connue pour ses magnifiques tenues : la couleur rouge est prédominante dans toutes ses robes, mais contrairement à certains artistes (je pense notamment au visual-kei) elle reste très soignée et ce n’est jamais provocant ; elle arbore un style oscillant entre gothic lolita et sweet lolita.

     

    Récemment (il y a un an à peu près), Kanon Wakeshima a formé un duo avec un membre des An Cafe. Devinez lequel… Kanon, évidemment ! Leur groupe s’appelle kanonxkanon et s’est produit à Paris, au Divan du Monde, le 16 novembre 2011.

     

    Je pourrai en dire des tonnes encore sur cette magnifique artiste qui a encore plein de temps devant elle pour nous faire partager ses merveilleux morceaux ! Je vous invite à écouter ou acheter ses albums qui, je le répète, sont licenciés en France (pour une fois, profitez-en !)

     


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  • Comme promis, voici la première partie du chapitre II de La naissance des Gardiens ! Ce sera une nouvelle divisée en quatre parties.

    Je l'ai écrite en juin 2012. Je n'ai pas spécialement eu de mal à l'écrire mais il y a eu beaucoup de changements en cours de route (l'héroïne était à la base, un héros !). Ce que je vous présente est la version définitive.

    J'espère que ça vous plaira  Enjoy et à la semaine prochaine pour la deuxième partie !

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  • "Best of des sonnets étranges", partie deux ! Promis, la semaine prochaine je passerai à quelque chose d'un peu plus... normal, si je puis dire

    Enjoy !

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